Classé parmi les ouvrages du XIIème siècle, il découvre le manuscrit d’un clerc oublié de Reims : Richer. Ce dernier a écrit une œuvre de 4 tomes pour raconter la vie des derniers carolingiens et de leur successeur, le capétien Hugues Capet. Le manuscrit est celui rédigé par l’auteur lui-même : oublié pendant des siècles, il comporte encore les corrections de Richer et n’a jamais été recopié.

Une découverte de taille pour une période mal connue, surtout après l’année 966 qui vit la mort de Flodoard, le principal chroniqueur de son temps. Aucun contemporain n’a jamais écrit la biographie de Hugues Capet et les événements ayant conduit à sa prise de pouvoir (qui eut quelques conséquences notables sur l’histoire de France et de l’Europe pendant les siècles suivants…) sont toujours demeurés obscurs aux historiens. Le manuscrit autographe de Richer allait enfin apporter la lumière.

Hélas… Ils seront déçus.

1833…. Bibliothèque de Bamberg en Bavière.

L’historien Georg Heinrich Pertz est à la recherche de manuscrits du haut moyen-âge pour constituer son ouvrage de référence:  Monumenta Germaniae Historica.

Reconstitution de la Cathédrale Carolingienne de Reims

Pour rester pudiques, ils diront que Richer est un rhéteur : quelques notes sobres de Flodoard sur une bataille et le nouveau rédacteur brode des discours et des retournements de situation, les armées deviennent des cohortes ou des légions, les rois reprennent les mêmes déclarations que les généraux romains… L’exactitude et la chronologie sont secondaires. L’essentiel est que le récit soit vivant. Et les historiens modernes doivent se débrouiller à faire le tri entre ce qui exact, exagéré, erroné, inventé ou même parfois légendaire… Pas toujours évident, mais Richer, le malaimé, est quasiment la seule source contemporaine des règnes des rois Lothaire, Louis V et Hugues Capet.

Comment cet unique manuscrit est-il parvenu entre les mains de notre Indiana Jones du XIXème siècle ?...

On ne peut faire que des hypothèses.

Histoire de Richer

Ce manuscrit a été rédigé dans les années 990.

Quelle était la situation à Reims ?

Avant 991, Arnoul, fils bâtard du roi Lothaire et grand défenseur du dernier prétendant Carolingien au trône, Charles-de-Basse-Lorraine, son oncle, était Archevêque de Reims. Avec l’affirmation du pouvoir d’Hugues Capet, il fut destitué et remplacé par Gerbert d’Aurillac, le futur Pape Sylvestre II.

Dans son manuscrit, Richer ne se prive pas d’exprimer son admiration pour le nouvel Archevêque et son mépris pour Arnoul. Mais le Pape intervint pour contester la destitution et, en 995, Arnoul fit son grand retour ! … Mauvaise pioche pour Richer !

On peut légitimement penser que le clerc fit alors profil bas, cessa la rédaction de son histoire et n’en fit faire aucune copie afin de ne pas ébruiter ses critiques envers Arnoul, qui allait rester Archevêque de Reims encore 26 ans.

Comment cet unique manuscrit arriva-t-il à l’Abbaye Saint-Michel de Bamberg ? Personne ne le sait.

Un peu plus d’un siècle s’était écoulé quand il fut consulté par un bavarois, Ekkehard d’Aura, qui l’utilisa pour sa chronique, et il se retrouva ainsi classé parmi les manuscrits du XIIème siècle. Il fut ensuite transféré à la Bibliothèque de la ville après la dévastation du monastère (en 1453) puis relié en 1611. En 1833, G.H. Pertz découvrait cette version reliée et la publiait enfin, plus de 800 ans après sa rédaction.

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Gerbert d'Aurillac