Les traités, voyez-vous, sont comme les jeunes filles et les roses: ça dure ce que ça dure !

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EVÉNEMENTSCAROLINGIENS

11/24/20254 min read

C’est ainsi que le Général de Gaulle commenta le coup de Jarnac infligé par le Bundestag lors de la ratification du traité d’amitié franco-allemand en 1963. Négocié entre un vieux briscard allemand, Konrad Adenauer, 87 ans !, et un jeunot français de 72 ans, de Gaulle, celui-ci devait jeter les bases d’une alliance franco-allemande et d’un bloc européen, indépendant des Etats-Unis et de L’URSS.

Le parlement allemand ratifia le traité… en y ajoutant un préambule qui le vidait de sa substance. Cette forfaiture provoqua la colère du président français, qui resta philosophe en public mais beaucoup plus explicite en privé :

« Ils se conduisent comme des cochons ! »… Elégant !...

« Les politiciens allemands ont peur de ne pas s’aplatir suffisamment devant les Anglo-Saxons ! »… Flatteur !...

« Si le traité allemand n’était pas appliqué, ce ne serait pas le premier dans l’Histoire»…

Sans blague !...

Le Général pensait certainement au traité de Versailles. Mais ce dernier s’inscrit dans une longue tradition de traités franco-allemands, plus ou moins éphémères, plus ou moins respectés, tradition qui commença certainement au temps des Carolingiens.

traité franco-allemand
traité franco-allemand

De Gaulle et Adenauer

De façon assez surprenante, alors que les Francs étaient perpétuellement en guerre, de nombreuses conquêtes ou redécoupages territoriaux ne furent pas les conséquences d’une bataille décisive, mais de traités diplomatiques négociés.

Les premiers Carolingiens respectèrent pourtant les fondamentaux du bon conquérant : ainsi, en 46 années de règne, Charlemagne convoqua… 44 fois l’armée pour ses campagnes du printemps et de l’été. Seules les années 790 et 807 n’eurent pas le droit à cet honneur. Les plus grands champions connaissent toujours des passages à vide.

De plus, Charlemagne était le seul Carolingien à régner en Europe. Une vieille tradition franque, consistant à partager l’héritage entre les fils du roi, permettait, en période de guerre un peu creuse, d’occuper l’armée en affrontant celle des autres héritiers.

Charlemagne n’eut qu’un seul fils survivant, Louis-le-Pieux, qui put donc préserver l’unité de l’Empire. Mais, à sa mort, en 840, trois fils revendiquèrent l’héritage et les bonnes vieilles guerres fratricides, si chères aux francs mérovingiens, purent reprendre de plus belle jusqu’au…

Charlemagne, Bataille, Saxons, Moyen-âge
Charlemagne, Bataille, Saxons, Moyen-âge

Charlemagne en visite chez les Saxons

traité, verdun, carolingiens
traité, verdun, carolingiens

Traité de Verdun en 843, le père de tous les traités franco-allemands (même si le terme franco-allemand est sans doute abusif).

Longuement négocié, ce traité entérina le partage de l’Empire Carolingien entre Lothaire, Louis (le Germanique) et Charles (le Chauve) et peut être considéré comme un des actes fondateurs de la France actuelle.

En effet, l’Empire fut divisé en 3 parties :

La Francie Occidentale, qui deviendra la France, correspond à peu près à l’emprise de la Gaule et des pays de langues romanes, héritières du latin des conquérants italiens. Cette Francie était la plus riche des trois et Charles-le-Chauve en devint le roi.

La Francie Orientale, qui deviendra la Germanie, où Rome s’était peu implantée et dont les territoires conservaient majoritairement leurs langues germaniques (tudesques), fut attribuée à Louis-le-Germanique.

Et… coincé entre ces deux Francie bien compactes, un machin tout bizarre, étiré sur des milliers de kilomètres de la Mer du Nord à l’Italie, comprenant certaines régions romanes et d’autres germaniques, qui fut appelé « Francie Médiane » et que l’on attribua à Lothaire, l’ainé des trois frères.

Sur le papier, Lothaire semblait avantagé : il conservait le titre d’Empereur et sa Francie comprenait Rome et Aix-la-Chapelle, les deux capitales prestigieuses. Mais il ne faut pas être grand clerc pour constater que son royaume, tout en longueur, était indéfendable. Ces deux voisins ne le protégeaient même pas des invasions extérieures puisque, au nord, les Vikings étaient tout proches et pouvaient remonter les grands fleuves pour attaquer au cœur du royaume, et, au sud, l’Italie était une proie permanente pour les armées musulmanes ou les grecs de Constantinople.

A priori, ce Traité de Verdun tenait plus de l’immortelle que de la rose si chère à de Gaulle: deux des trois états créés existent toujours. Mais ce traité n’était que le reflet d’une situation de fait et d’une fracture déjà existante entre deux régions déjà bien distinctes; le serment de Strasbourg de 842, rédigé en deux versions, romane et tudesque, rappelle l'existence de ces deux mondes antérieurs au traité.

Sans surprise, l’hétéroclite « Francie Médiane » disparut rapidement. Source de conflit, pendant des siècles entre ses deux sœurs Occidentale et Orientale, ses lointains rejetons se nomment les Pays-Bas, la Belgique, l’Alsace-Lorraine ou la Suisse.

Cette disparition fut actée 12 ans après Verdun, au…

Traité de Prüm en 855

La suite au prochain numéro.

#Carolingien #moyenage #histoiredefrance

carolingiens, verdun, traité
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