Un CV en béton... Un palmarès de légende... Des références inattaquables... Herbert II de Vermandois, mon féodal préféré.

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PERSONNAGESCAROLINGIENS

9/19/20254 min read

L’époque carolingienne fourmille de personnages hauts en couleur et notamment de féodaux prêts à toutes les vilenies pour agrandir leur domaine. On pourrait citer Baudoin II de Flandres qui, fidèle à sa réputation de cupidité, n’hésita pas à faire assassiner l’Archevêque de Reims Foulques, ou encore Guy de Spolète, qui fit emprisonner le Pape Jean VIII puis essaya vainement de s’emparer du Trône de Francie Occidentale. Le personnage avait de la suite dans les idées puisqu’il réussit à se faire désigner Roi d’Italie et finalement sacrer Empereur.

Thibaud le Tricheur… Boson l’Usurpateur… Arnoul de Flandres… Chacun a son petit mérite, chacun a droit à un satisfecit, mais ils ne valent guère qu’un premier accessit, car celui que je préfère, c’est Herbert II de Vermandois (et non la guerre de 14-18…).

Raconter sa biographie complète serait sans doute fastidieux et répétitif; je préfère extraire quelques réussites brillantes parmi toutes les trahisons, revirements et autres machinations diverses dont fit preuve Herbert tout au long de sa carrière. Ce trait de caractère était cependant partagé par de nombreux contemporains qui souhaitaient tous agrandir leurs possessions en mettant la main sur de nouveaux comtés et abbayes. Mais Herbert réussit à tous les surpasser.

Son fait d’arme le plus célèbre reste l’emprisonnement du Roi Charles-le-Simple qui finit par mourir en captivité dans la tour de Péronne en 929. Belle performance, qui a cependant été accomplie par d’autres féodaux, comme Hugues-le-Grand, le père d’Hugues Capet, qui fit enfermer le Roi Louis IV d’Outremer. 

Les Carolingiens face à la féodalité.

Vermandois, Comte, Carolingien
Vermandois, Comte, Carolingien

Herbert II de Vermandois

Pour moi, son chef d’œuvre reste l’élection de son fils Hugues comme Archevêque de Reims.

A cette époque, il était courant que les féodaux placent leur progéniture à la tête de grands évêchés pour renforcer la position de leur famille. Toutefois Herbert II de Vermandois sut innover en réussissant à faire nommer son fils Hugues, alors âgé de … 5 ans. Un exploit quand on connait la procédure de désignation : présenter son candidat, le faire reconnaitre par les représentants de l’Eglise de Reims, puis obtenir la validation de l’élection par le Roi et par le Pape lui-même…

Quelques disparitions opportunes, une bonne dose d’intimidation, des évêques complaisants, beaucoup de promesses, des dépenses bien ciblées, telle fut la recette qui permit à Herbert II de franchir tous les obstacles… Il les franchit même à deux reprises : à 12 ans, le petit Hugues de Vermandois avait bien grandi et promettait de devenir un bel Archevêque, mais les Rémois, dans un soudain éclair de lucidité, réussirent à le chasser du siège épiscopal.

Ayant une réputation à défendre, son père parvint à le rétablir et à remettre une nouvelle fois la main sur l’évêché.

Plus généralement on ne peut que s’incliner devant le culot sans limite dont il fit preuve en toute circonstance.

Le Roi Raoul, notamment, dut subir les multiples félonies de ce féodal sans moralité. Ainsi, Herbert II de Vermandois n’hésitait pas à sortir de sa prison son détenu le plus précieux, le Roi Carolingien Charles-le-Simple; il le reconnaissait comme souverain légitime, le faisait acclamer dans plusieurs villes du royaume... et le renvoyait en prison une fois que le roi Raoul avait cédé à ses demandes…

Herbert II de Vermandois, ou la politique sans les scrupules…

Herbert de Vermandois, Louis IV d'outremer, enluminure
Herbert de Vermandois, Louis IV d'outremer, enluminure

L'épisode suivant révèle bien que Herbert II bénéficiait du respect total de ses contemporains.

A la mort du roi Robert Ier, les féodaux se réunirent pour désigner un nouveau souverain. Trois candidats se présentèrent ou furent pressentis : le Capétien Hugues-le-Grand, le Bosonide Raoul de Bourgogne, qui sera finalement choisi, et Herbert II de Vermandois, qui avait l’avantage d’être Carolingien. L’élection s’annonçait compliquée car elle ne devait pas conduire à une nouvelle guerre civile entre les prétendants.

L’ Aristocratie, pourtant peu scrupuleuse quand il s’agissait de s’emparer d’un comté voisin ou de saccager les campagnes d’un adversaire, décida, comme un seul homme, d’écarter Herbert: il n’était pas envisageable d’accorder la moindre confiance à cet homme, même selon les critères...  disons... plutôt...souples... de l’époque…

Une forme d’hommage de ses pairs à l’ensemble de son œuvre, bien qu’il ne fût, en 923, qu’au début de sa carrière. Un homme exceptionnel ne peut longtemps rester ignoré.

Pendaison (fictive) de Herbert II de Vermandois par Louis IV d'Outremer

Un dernier aspect, tragique, du personnage reste à souligner: Herbert II de Vermandois se distingue des autres comtes par ses origines, puisqu’il descendait directement de Charlemagne par la branche ainée des fils de l’Empereur, alors que les rois carolingiens régnants n’étaient que les représentants de la branche cadette.

Comment sa famille avait-elle été écartée du pouvoir ?

Quand Charlemagne mourut en 814, il ne lui restait plus qu’un seul fils, Louis-le-Pieux, roi d'Aquitaine, qui recueillit l’intégralité de l’héritage paternel. Pourtant le nouvel Empereur avait deux frères ainés : Charles-le-Jeune, qui disparut en 811 sans descendance et Pépin, roi d’Italie, qui mourut en 810 en laissant plusieurs enfants dont Bernard, futur roi d’Italie. Mais on jugea préférable d’écarter cet enfant de 13 ans au profit de son oncle et l’unité de l’Empire fut préservée.

Quelques années plus tard, Bernard d’Italie fut condamné par l’Empereur Louis-le-Pieux. Aveuglé, il mourut des suites de son supplice en laissant un jeune fils, Pépin, le premier comte de Vermandois et grand-père de Herbert II. Ce dernier n’avait sans doute pas oublié le traitement infligé à sa famille par la branche cadette des carolingiens, branche cadette dont était issu son célèbre prisonnier, le roi Charles-le-Simple.

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Généalogie, carolingiens
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